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Rigoletto au cirque dans l’arène de Macerata

Rigoletto au cirque dans l’arène de Macerata

Rigoletto est un des opéras à festival capable de remplir les gradins des plus grandes scènes comme celle, magique, du Sferisterio à Macerata et même lorsqu’un traître se glisse dans une mise en scène inspirée. Explications…

Rigoletto (Damiano Salerno) Macerata Opera Festival © Luna Simoncini

Macerata a bien des atouts. La superbe ville des Marches, la région italienne épargnée par le tourisme de masse, accueille les mélomanes en grand. L’époustouflant Sferisterio peut accueillir jusqu’à 3000 spectateurs lors du MOF, le Macerata Opera Festival. Le rendez-vous incontournable de l’été italien ne se contente pas de reprendre les grands titres du répertoire. En 2025, il innove également en pariant, par exemple, sur une Veuve Joyeuse de Lehár aux côtés de Rigoletto et d’un Macbeth assez rare sur les grandes scènes. C’est parce que la tragique histoire du bouffon de Verdi attire un grand nombre de spectateurs qu’il faut choisir une mise en scène qui réunisse à la fois le néophyte et le spécialiste avec une distribution sans reproche. Avec la reprise de la production de Federico Grazzini de 2005, Macerata a vu juste malgré une distribution vocale inégale. Ce vendredi 25 juillet, soir de seconde représentation de la nouvelle saison, tous les artistes n’ont pas été aussi « mobile » que la Donna !

Un meurtrier en série rôde sur la scène du Sferisterio

Rigoletto (Luca Park, Ivan Magrì) Macerata Opera Festival © Luna Simoncini

"Questa o quella...", « Caro nome », « Bella figlia dell’amore », pour illustrer les grands tubes du Rigoletto de Verdi, les directeurs artistiques de toutes les salles et de tous les festivals du monde entier font face à un choix cornélien. S’ils suivent la tradition, ils ennuieront les habitués qui ont déjà vu l’œuvre cent fois tandis qu’avec des spectacles trop modernes, ils perdront à coup sûr le public festivalier amateur. La production de Federico Grazzini propose un entre-deux qui convient parfaitement aux reprises. Son spectacle suit à la lettre l’histoire de Victor Hugo, mise génialement en musique par Verdi, tout en offrant une vision personnelle des plus intéressantes. Le palais du Duc de Mantoue est un cirque délabré où se retrouve une bande de mafieux inquiétants tandis que Rigoletto, le clown de service, vit non loin dans une triste caravane où il enferme sa fille Gilda. De l’autre côté du grand plateau du Sferisterio, Sparafucile, assassin à la petite semaine aux allures de tueur en série, tient une baraque à frites où il aiguise ses couteaux. Dans une ambiance sordide et lugubre (comme le veut le livret de Francesco Maria Piave écrit pour Verdi), l’endroit interlope, qui accueille prostitués et travestis au dernier acte, rappelle plus Simenon que Hugo. Le drame est bien servi par cette mise en scène, jamais excessive, qui penche davantage du côté du fait divers que de l’épate à grand budget.

Gilda et Verdi, la trahison à deux étages du Duc de Mantoue

Rigoletto (Damiano Salerno, Ruth Iniesta) Macerata Opera Festival © Luna Simoncini

Au cœur du dispositif, il faut de grands acteurs et chacun tient plus ou moins bien son rôle. Damiano Salerno est un Rigoletto crédible avec un timbre clair. Investi scéniquement, il peine pourtant à faire passer l’émotion avec une voix uniformément droite et rendue inexpressive, faute de nuances. Il forme cependant un beau duo avec la Gilda de Ruth Iniesta, une évidence. Sans aucune minauderie, la soprano espagnole apporte la dimension attendue à ce rôle emblématique avec une ligne vocale souveraine et des aigus faciles même si l’on sent qu’elle peut chanter encore mieux (les soirs de deuxième représentation ne sont pas réputés les meilleurs). Il Duca di Mantova, troisième personnage et le méchant de l’histoire, est le point faible de la soirée. En méforme, Ivan Magrì force ses aigus qui plafonnent désagréablement dans les arias parmi les plus connus de Verdi avec un vibrato préoccupant. Sparafucile ânonne encore trop son texte mais nul doute que Luca Park affinera sa partie car sa voix de basse est saine même si l’artiste n’incarne pas assez la noirceur de son personnage. Le niveau de l’ensemble des comprimari est très satisfaisant avec Carlotta Vichi bien distribuée en Maddalena comme Aleksandra Meteleva qui se fait remarquer dans le très court rôle de La Contessa di Ceprano. Jordi Bernàcer est un chef inspiré qui vit le drame et la partition avec intensité. Il est bien dommage qu’il ne soit pas suivi par les musiciens du FORM-Orchestra Filarmonica Marchigiana, insuffisamment à la hauteur d’un tel ouvrage. C’est d’autant plus dommage que les membres du Coro Lirico Marchigiano “Vincenzo Bellini” sont eux parfaitement investis. Trahi par son Duc et l’orchestre, Rigoletto aura subi les coups d’une malédiction inattendue.

Rigoletto - Macerata Opera Festival © Luna Simoncini

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