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Nureyev, idole dorée et livresque de Boccadoro

Nureyev, idole dorée et livresque de Boccadoro

Rudolf Nureyev est bien connu des mélomanes qui ont pu l’admirer sur les grandes scènes et ont leurs propres souvenirs du danseur de légende. Mais sont-ils aussi précis que ceux de Patricia Boccadoro évoqués dans son livre ? Explications…

Rudolf Nureyev, As I remember him © DR

Qui était vraiment Nureyev ? Une question que beaucoup se sont posée, en témoignent les nombreux ouvrages en librairie qui dépeignent à leur manière, la vie du danseur. Le 23 septembre 2023, « Rudolf Nureyev, as I remember him » le livre de Patricia Boccadoro, est sorti aux éditions The Book Guild. C’est Rudolf Nureyev lui-même qui a encouragé la journaliste de danse à écrire. Recueillant témoignages, anecdotes, souvenirs, photos inédites, l’autrice transmet son admiration infinie pour le danseur de légende et livre « sa » vérité sur Noureyev, appuyée par les dires des personnes les plus importantes de sa vie.

Rudolf, première superstar masculine du ballet 

Rudolf Nureyev, As I remember him © DR

Après une première découverte de l’artiste de légende sur scène en 1962, Patricia Boccadoro le croise au coin d’une rue à Londres à la suite à une représentation de Giselle, puis le rencontre officiellement au début des années 70, dans sa loge au Théâtre des Champs-Elysées après un spectacle avec Ivry Gitlis. Elle ne cessera de le suivre de près. Dans le livre qu’elle lui consacre, elle retrace la vie plus qu’exceptionnelle de celui qui a révolutionné le monde du ballet : sa naissance dans un train en 1938 dans une Russie en guerre, le début de carrière au Kirov, sa demande d’asile en 1961 et l’épisode de sa « défection » à l’aéroport du Bourget, ses années de gloire à Londres et le duo légendaire qu’il forme avec Margot Fonteyn. Ceux qui ne les ont jamais vus sur scène le regrettent et rugissent encore de frustration tandis que ceux qui ont eu la chance d’être témoins de leur symbiose, se souviennent des longues heures de queue à camper devant la billetterie avec thermos et couvertures dans l’espoir d’obtenir une place. Sont évoquées également jusqu’aux derniers jours les années à l’Opéra national de Paris et notamment, son travail de chorégraphe sur La Bayadère, après avoir photocopié en cachette les partitions de Minkus en Russie avec l’aide de Douce François pour les emporter en Occident. Patricia Boccadoro a rassemblé son témoignage ainsi que ceux de Charles Jude, Elisabeth Platel (directrice actuelle de l’école de danse de l’Opéra national de Paris), Maud Gosling, Florence Clerc, Manuel Legris et bien d’autres encore partageant son émerveillement et son amour au fil des pages, parfois trop présent. L’impact qu’a eu Nureyev sur le Ballet de l’Opéra de Paris est ici mis en lumière. Il relèvera la compagnie au plus haut niveau d’excellence et de prestige tout en accueillant de nouveaux chorégraphes contemporains tels que William Forsythe, Merce Cunningham ou Martha Graham. Il en bousculera la hiérarchie si ancrée en nommant étoile de très jeunes danseurs. Les témoignages se succèdent. Avec Rudolf chaque danseur, tous grades confondus, se sentait spécial car il leur donnait l’attention nécessaire pour qu’ils atteignent l’excellence. Au milieu des 154 danseurs de la compagnie, être considéré par le directeur, et particulièrement lorsqu’il s’appelle Rudolf Nureyev, est un sentiment bien décrit dans l’ouvrage. Le sujet est toujours d’actualité avec José Martinez, actuel directeur de la compagnie, qui se livre aussi à Patricia Boccadoro sur son souhait de faire perdurer la vision si chère à Nureyev.

Perspectives et nouvelles vues sur le danseur du siècle

Nureyev - Saint Bart' 1988 - collection personnelle de Florence Clerc

Chacun a entendu parler de Rudolph Nureyev au moins une fois dans sa vie mais combien sont ceux qui ont connaissance de son rêve de diriger la musique de ses ballets ? Il a étudié à la Julliard School et s’est pourtant produit en tant que chef d’orchestre dans le monde entier. D’autre part, lorsqu’il créait les rôles masculins, il  imaginait également l’échauffement, tout au long de la représentation, afin que le corps soit toujours prêt à réaliser les chorégraphies des derniers actes, d’une grande complexité technique. Rappelons que le danseur d’excellence a apporté une révolution en sublimant les hommes qui n’étaient alors qu’en appui aux ballerines. Avec une écriture de vraie connaisseuse, Patricia Boccadoro propose un ouvrage qui regorge d’anecdotes sur le grand artiste mais aussi sur le monde du ballet, deux axes de lecture qui sont rythmés par des photos inédites de la collection personnelle de Florence Clerc (grande amie de Rudolf avec son mari Charles Jude). Grâce à cet accès privilégié au génie qu’était Nureyev, l’on en découvre un peu plus sur sa personnalité, sa sensibilité, sa soif insatiable de culture, ses lieux préférés pour se ressourcer, son amour pour les tapis orientaux mais aussi son besoin vital de danser, sa détermination à mettre en forme ses idées, sa bienveillance comme parfois son intransigeance. Ce livre fera le bonheur des balletomanes ou de toute personne intéressée par la danse tant il fourmille d’anecdotes et de détails autour du monde du ballet. Nombreuses sont les références qui réveilleront sûrement les souvenirs et referont vibrer tous les chanceux qui ont pu admirer Rudolf sur scène. Comme disait Margot Fonteyn : « I witnessed greatness » (J’ai été témoin de la grandeur). En attendant la traduction en français, Patricia Boccadoro nous offre une mine d’or et laisse chacun libre d’imaginer « son » Nureyev. 

Tapis sombre déployé par Sharon Eyal pour l’ouverture du Festival de Danse Cannes

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Chacun cherche sa Flûte enchantée au Théâtre des Champs-Elysées

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