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Les Saisons de Thierry Malandain en première d’automne à Cannes

Les Saisons de Thierry Malandain en première d’automne à Cannes

Lorsqu’on lui parle d’un compositeur oublié, le mélomane dresse tout de suite les oreilles. Avec le chorégraphe virtuose Thierry Malandain, il ouvre grands les yeux surtout lorsqu’il s’agit des fameuses Saisons de Vivaldi mais également de Guido ! Explications... 

Mickaël Conte et Claire Lonchampt, Les Saisons © Olivier Houeix

Deuxième jour du Festival de Danse Cannes et la Côte d’Azur s'anime de plus belle. Ce 25 novembre 2023, un beau soir d’automne, Les Saisons, dernière création de Thierry Malandain, est présentée dans le Grand Auditorium du Palais des Festivals en première mondiale. Sur une idée de Laurent Brunner, directeur de Château de Versailles Spectacles et de Stefan Plewniak, violoniste et premier chef d’orchestre de l’Opéra royal, le ballet pour les vingt-deux danseurs du Malandain Ballet Biarritz lie les célébrissimes Quatre Saisons d’Antonio Vivaldi avec celles méconnues de son contemporain Giovanni Antonio Guido. L’histoire ne nous permet pas (encore) de définir quel compositeur fut le premier à écrire ces hymnes à la nature mais le choix audacieux éveille la curiosité des festivaliers. 

A tout art son histoire et Malandain son compteur chorégraphe 

Les Saisons de Thierry Malandain © Olivier Houeix

Thierry Malandain, danseur professionnel formé par les plus grands, devient chorégraphe non pas par vocation mais par un heureux hasard, en répondant à une petite annonce pour participer à un concours ! Il a pourtant un talent évident puisque ses premières chorégraphies reçoivent aussitôt les premiers prix. Alors qu’il rêve de rejoindre la compagnie de Jirí Kylián à La Haye en tant que danseur, il crée sa compagnie Temps Présent en 1986. Le ministère de la Culture et de la Communication et la ville de Biarritz lui propose ensuite de fonder le Centre Chorégraphique National – Ballet Biarritz. Rebaptisée Malandain Ballet Biarritz, la compagnie connaît depuis un succès important. L’histoire de la danse prend une place importante dans le travail de Malandain qui publie chaque trimestre le portrait d’une personnalité de la danse souvent oubliée mais qui est passée par la ville de Biarritz. Les recherches titanesques le mènent à bousculer l'histoire de la danse qui, trop centrée sur l’opéra de la capitale, oublie trop souvent les innombrables artistes de provinces. En 2019, Thierry Malandain est élu à l’Académie des beaux-arts où il occupe le fauteuil numéro 1 de la section chorégraphie. Entremêlant cette fois l’histoire de danse et recherches musicologiques, il a créé en six semaines son nouveau spectacle Les Saisons en utilisant les partitions de Vivaldi et de Guido. Le corps de l’ancien danseur de 64 ans ne montre plus mais c’est perché sur une chaise au milieu du studio de danse, entouré des vingt-deux danseurs, qu’il a créé la chorégraphie. Son inspiration toujours renouvelée, il diversifie une nouvelle fois son répertoire. 

La nature en huit saisons signées Guido & Vivaldi 

Hugo Layer, Les Saisons © Olivier Houeix

Entourés de trois murs noirs couverts de feuilles fanées et calcinées, les danseurs vêtus de costume neutre noir font preuve d’une grande technique qui sert les suites d’enchaînement relevant du vocabulaire néoclassique. Le terme est cependant désapprouvé par le chorégraphe qui préfère décrire l’ensemble comme ballet en quête d’harmonie entre le classique et le contemporain. Trois tableaux en alternance rythment les huit saisons de Vivaldi et de Guido. Les yeux suivent la cadence soutenue des duos et ensembles virevoltants sur scène. Inspiré des danses basques, le chorégraphe surprend avec des rondes et des parcours géométriques originaux. Pour apprécier pleinement sa construction, le ballet s’apprécie mieux, éloigné de la scène. Les quatre danseurs qui évoluent sur la musique de Guido portent un imposant jupon du 18ème siècle agrafé. La fracture des deux partitions s’exprime également dans le jeu de lumière de François Menou qui dévoile une palette de couleurs différentes à chaque tableau. Pour le troisième, c’est un plateau vide qui accueille tel un ange, Hugo Layer suscitant enfin sensibilité et émotion. Il porte à la main une feuille, comme une plume qui s'envole puis retombe. Le danseur laisse une telle impression que les spectateurs attendent ensuite son retour sur scène avec impatience. Il sera ensuite rejoint en duo par Patricia Velázquez, puis en trio avec Raphaël Canet et enfin en quatuor avec la divine Claire Lonchampt toujours très remarquée. Enfin, les vingt-deux danseurs jaillissent parés de cette feuille mourante au bout des doigts, la ravivent, la brandissent, l’agitent. Soixante minutes de musique baroque sur un rythme effréné de danse peuvent parfois faire perdre l’attention du spectateur mélomane qui regrettera l'absence d’un orchestre. Alors que ce ballet n’a pas pour vocation première d’exprimer un message politique, les fleurs agonisantes qui tapissent la majestueuse scène rappellent une réalité sombre, celle de la nature que l’humain épuise irrévocablement. Le chorégraphe retrouve le thème de ses dernières pièces autour de l’Humanité et la Nature. Cette nouvelle création ne pourra que s’épanouir et s’affirmer lors d’une tournée dans le monde, parfois heureusement accompagnée d’un orchestre. 

Benjamin Bernheim un Hoffmann d’anthologie pour Bastille

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Tapis sombre déployé par Sharon Eyal pour l’ouverture du Festival de Danse Cannes

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