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Aida en son monumental royaume aux Arènes de Vérone

Aida en son monumental royaume aux Arènes de Vérone

En 99 ans, le Festival de Vérone aura enthousiasmé plus d’un festivalier avec des productions sensationnelles. Et pourtant, une esclave domine l’amphithéâtre depuis toujours et la reine Aida n’est pas prête à abandonner son trône. Compte-rendu…

Aida - Arena di Verona © Foto Ennevi

Certains événements possèdent un avant, celui du désir, du phantasme et celui tenaillant de l’attente. Pour le mélomane, une représentation d’opéra aux arènes de Vérone rime avec rêve d’Egypte puisque le spectacle le plus emblématique de la grande manifestation italienne est bien l’Aida de Verdi. Le dimanche 4 septembre 2022, la 99ème édition du Festival dell'Arena di Verona a fermé ses portes avec le chef-d’œuvre que tout amateur lyrique attend de voir un jour dans ce lieu d’exception. Le gigantisme des arènes comme celui des pyramides de Gizeh offre une scène où toutes les extravagances hollywoodiennes (ou plutôt « cinecittesques ») sont permises. Après une Turandot impressionnante mais vocalement décevante et un grand Nabucco (Luca Salsi) malgré sa mise en scène inaboutie, la production de Franco Zeffirelli a conquis son public avec éclat même avec quelques réserves sur la distribution vocale.

Un quatuor à la conquête des pyramides d’Egypte  

Aida (Olesya Petrova, Monica Conesa) - Arena di Verona © Foto Ennevi

Annoncé dans le rôle de Radamès, Fabio Sartori a disparu de l’affiche pour être remplacé par un autre ténor sans trop d’explications. Après les Chorégies d’Orange en août où il avait déjà fait faux bond, voici le deuxième rendez-vous manqué avec cet artiste qui semble tout désigné pour chanter l’Arlésienne. Riccardo Massi n’est pas un second choix même s’il rate son air d’entrée « Celeste aida » avec des portamenti sans grand style et en l’absence de pianissimi sur la note finale. Trop vite jugée, sa prestation s’étoffe et le ténor fait ensuite mieux que remplir son office. Le jeu assez atone du comédien est fort heureusement servi par une voix solide, juste et balancée qui convient au capitaine égyptien. Le rôle d’Aida, la reine des arènes, est tenu par Monica Conesa, une très jeune soprano cubano-américaine de 26 ans. Le format vocal trop petit n’est pas celui exigé par la partition de Verdi. L’engagement théâtral sincère tire profit d’un physique de cinéma mais malgré de jolis pianos, l’artiste, plus Liù qu’Aida, frise l’accident bien souvent. Avec des inflexions et un vrai style verdien, sa rivale Amnéris interprétée par Olesya Petrova n’en fait qu’une bouchée. Un artiste domine toutefois d’une tête une distribution globalement satisfaisante. La grande et saine voix d’Amartuvshin Enkhbat donne épaisseur et noblesse au rôle d’Amonasro que l’on trouve beaucoup trop court tant la présence rayonnante du baryton est intense.

Franco Zeffirelli décrypte les hiéroglyphes

Aida (Amartuvshin Enkhbat, Monica Conesa) - Arena di Verona © Foto Ennevi

A la tête d’un chœur (impeccablement préparé par Ulisse Trabacchin comme pour Nabucco) et d’un orchestre exemplaires (trompettes brillantissimes, assez inoubliables) le chef Daniel Oren n’aide pas toujours les chanteurs débutants avec ses tempi étirés mais donne de la personnalité à sa direction. Le soin apporté à la distribution des seconds rôles par le Festival des arènes de Vérone se remarque ce soir encore. Romano Dal Zovo (Il Re) et surtout Riccardo Zanellato (Ramfis) font mieux que tirer leur épingle du jeu. Entre drame intime et très grand spectacle, mettre en scène Aida peut se révéler une gageure pour les metteurs en scène d’une autre trempe que celle de Franco Zeffirelli. Même s’il en faisait parfois trop, l’homme de théâtre regretté savait organiser les mouvements pour frapper les esprits. Les moments d’émotion nombreux étonneront ceux qui ont trop vite fait de le cataloguer. Avec des décors et des costumes qui assument leur côté hollywoodien, c’est par une relative sobriété et l’alternance des atmosphères que la mise en scène surprend le plus car elle arrive à toucher.  Certaines scènes imprègnent la rétine et se fixent dans le souvenir. Hormis un ballet aux forts relents colonialistes contestable, la production traditionnelle à grand spectacle reste un exemple du genre qu’il faut impérativement voir une fois dans sa vie, un grande réussite intemporelle !

Aida / Arena di Verona © Foto Ennevi

Jakub Józef Orliński, Orfeo esthète en son Elysée

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Un grand Nabucco revisité aux Arènes de Vérone

Un grand Nabucco revisité aux Arènes de Vérone