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Tapis sombre déployé par Sharon Eyal pour l’ouverture du Festival de Danse Cannes

Tapis sombre déployé par Sharon Eyal pour l’ouverture du Festival de Danse Cannes

Le mélomane apprivoise les mises en scène de plus en plus modernes d’opéras, mais aussi les chorégraphies. C’est au Festival de Danse de Cannes qu’il se rend pour se laisser surprendre par un programme de créations éclectiques. Compte-rendu...

Into the Hairy, Sharon Eyal © Katerina Jebb

Le Théâtre Debussy se remplit peu à peu ce vendredi 24 novembre 2023. Didier Deschamps, directeur artistique du Festival de Danse Cannes, ancien directeur du Théâtre national de la Danse – Chaillot, et David Lisnard, Maire de Cannes, accueillent les festivaliers afin de déclarer ouverte la 24ème édition. Dans une actualité sombre, le Maire déclare que “Plutôt que de s’en prendre à des innocents, nous devrions tous danser”. Succédant à Brigitte Lefèvre à la tête de la manifestation, Didier Deschamps présente ici son premier programme méticuleusement choisi avec comme thème les pulsions du monde, ses beautés et les enjeux car, comme il le précise : “ la danse n’est pas exempte de pensée”. Sharon Eyal ouvre le bal avec Into the Hairy, récemment créé à Montpellier Danse (juin 2023). Pour sa première venue au Festival, la chorégraphe israélienne propose une pièce pour huit danseurs qui emmènera les visiteurs de la Croisette dans un voyage dansé.

L’écriture de Sharon et la partition de Koreless

Into the Hairy, Sharon Eyal © Katerina Jebb

Sharon Eyal danse pendant dix-huit ans au sein de la Batsheva Dance Company qu’elle intègre en 1990 pour prendre ensuite le poste de directrice artistique adjointe, position qu’elle occupe de 2005 à 2012. Très tôt, rugit en elle une inspiration qui la conduira à créer seize pièces chorégraphiques pour la Compagnie où elle révèle une écriture qui lui est propre. En 2013, elle co-crée sa compagnie avec Gai Behar, grande figure de la scène rave de Tel Aviv, qu'ils nomment L-E-V compagny (signifiant “cœur” en hébreu). La musique tient une place majeure dans son travail inspiré par le monde la nuit. Eyal collabore ici avec Lewis Roberts, plus connu sous le nom de Koreless, musicien et producteur électronique britannique. Une alchimie immédiate s’est faite entre les deux artistes qui ont entremêlé leur art pour imaginer Into the Hairy. S’est jointe à l’équation, Maria Grazia Chiuri, directrice artistique de la maison de couture Dior, qui poursuit sa collaboration avec la chorégraphe depuis 2018 et confectionne les costumes de la pièce. Le spectacle débute par une improvisation de la chorégraphe qui offre une parenthèse dans un monde à l’esthétisme magnétique où s’affirme une écriture singulière d’Eyal. Toutes ses pièces sont liées mais chacune existe individuellement.

Eyal évolue dans la claire obscurité

Into the Hairy, Sharon Eyal © Katerina Jebb

Le son de quelques gouttes résonne dans les oreilles du public plongé dans l’obscurité. Une lumière tamisée encercle huit formes. L’on distingue alors des corps enveloppés de mues de serpent de dentelle noire, telle une seconde peau, et chaussettes hautes (Eyal ne travaillant pas avec le pied nu) qui forment un tout. Peu à peu, ils s’agitent et, défiant les codes de la nature, adoptent une marche avec un pied sur demi-pointe. Torsion du corps et mouvements saccadés, le groupe, presque animal, se déplace peu à peu sur la grande scène du Théâtre Debussy, le plateau étant un peu trop vaste pour cette conception. Portés entomiques s’accompagnent de regards perçants avec le rimmel dégoulinant. Soudain, un danseur s’extrait du groupe pour proposer un solo, rapidement rejoint par les siens. Le temps s’arrête et, bercés par les chants, l’on se sent happé par cette étrange atmosphère, une ambiance qui pourtant attire. Le travail d’Alon Cohen, créateur des lumières, exprime la puissante clarté à travers le sombre et exacerbe le désir d’appartenir à ce groupe qui hypnotise. Les danseurs d’exceptions (Keren Lurie Pardes, Guido Dutilh, Alice Godfrey, Nitzan Ressler, Darren Devaney, Johnny McMillan, Juan Gil et Frida Dam Siedel) font don de leur maîtrise du corps pour se fondre entièrement dans l’expressivité. L’esthétisme créé un tel envoûtement que la brusque fin rend difficile le retour au quotidien tant il est pénible de sortir de la pièce. Une création à voir et à revoir pour un moment into the hairy.

Into the Hairy, Sharon Eyal © Katerina Jebb

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